En octobre 2024, une étude sur le dialogue social révélait que seulement 14 % des comités sociaux et économiques (CSE) se voyaient présenter régulièrement la portée environnementale des activités de leur entreprise. Ce chiffre souligne un retard considérable alors même que la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) s’impose comme une composante incontournable de la stratégie d’entreprise. À l’heure où les exigences en matière de durabilité s’intensifient, notamment sous l’impulsion de la directive CSRD et de la transposition en droit français par l’ordonnance de décembre 2023, les entreprises sont désormais tenues d’intégrer les enjeux écologiques, sociaux et de gouvernance dans leur fonctionnement quotidien.
Cette évolution réglementaire s’inscrit dans un contexte de profondes transformations économiques et sociétales. Les attentes des salariés, des clients et des parties prenantes se sont accrues, plaçant la durabilité au cœur des modèles d’affaires. Le développement durable ne relève plus d’une démarche volontaire isolée ; il devient un critère structurant de compétitivité et d’attractivité pour les entreprises, avec des impacts mesurables sur l’organisation du travail, l’innovation sociale et la gouvernance. La transition écologique en entreprise nécessite une approche systémique où la consultation, l’implication et l’information des représentants du personnel jouent un rôle déterminant.
Dans ce cadre, le CSE voit son rôle se transformer en profondeur. De simple instance consultative, il devient un levier stratégique pour accompagner, encadrer et accélérer la transition écologique et sociale. En tant que courroie de transmission entre salariés et direction, le CSE est désormais un acteur incontournable pour intégrer la RSE dans les choix stratégiques, nourrir le dialogue environnemental et social, co-construire les actions RSE, et assurer la crédibilité de la démarche d’entreprise durable.
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L’évolution réglementaire plaçant le CSE au cœur de la stratégie RSE
La directive CSRD : un nouveau cadre pour la RSE en entreprise
Adoptée en 2022, la directive européenne CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) impose aux grandes entreprises de publier des informations détaillées sur leur performance extra-financière. Ce nouveau cadre réglementaire élargit considérablement les obligations de transparence en matière sociale, environnementale et de gouvernance.
La transposition de cette directive en droit français, actée par l’ordonnance n°2023-1142 du 6 décembre 2023, a introduit une innovation majeure : l’obligation de consulter les comités sociaux et économiques (CSE) sur les informations liées à la durabilité. Depuis le 1er janvier 2025, ce dialogue est devenu un passage obligé pour les entreprises soumises à la CSRD.
Consultation obligatoire du CSE : une reconnaissance renforcée
L’article L.2312-17 du Code du travail impose désormais aux entreprises concernées de consulter leur CSE sur les informations de durabilité. Cette consultation couvre plusieurs dimensions stratégiques :
- Les orientations et plans d’action environnementaux
- La situation extra-financière et les risques ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance)
- Les impacts du changement climatique sur l’activité et l’organisation du travail
Le CSE est ainsi appelé à jouer un rôle actif dans la compréhension, l’évaluation et, le cas échéant, la contestation des politiques RSE proposées par la direction.
De la BDES à la BDESE : un outil au service des élus
L’évolution réglementaire s’accompagne de l’enrichissement de la base de données économiques et sociales, devenue BDESE (Base de Données Économiques, Sociales et Environnementales).
Les informations disponibles pour les élus du personnel s’étendent désormais aux enjeux de transition écologique :
- Empreinte carbone de l’entreprise
- Plans de sobriété énergétique
- Politiques d’égalité et d’inclusion
- Gouvernance durable
La BDESE constitue un support stratégique pour le CSE, lui permettant d’exercer pleinement son droit d’information, d’alerte et de proposition en matière de responsabilité sociétale des entreprises.
Durabilité et transparence : de nouvelles attentes à intégrer
Au-delà de l’obligation légale, l’évolution vers une gouvernance durable répond à une pression accrue des parties prenantes. Les salariés, mais aussi les clients, les investisseurs et la société civile, exigent désormais une transparence réelle sur les engagements environnementaux et sociaux.
Cette transformation culturelle pousse les entreprises à repenser leur dialogue social en y intégrant la transition écologique comme un axe stratégique majeur. Dans ce contexte, le CSE apparaît non seulement comme un garant de l’information, mais aussi comme un acteur clé capable de co-construire des actions concrètes au service d’un développement durable ambitieux et crédible.
Le CSE, levier essentiel du dialogue social pour accompagner la transition RSE
Le CSE comme relais des préoccupations environnementales et sociales
Face aux enjeux croissants de développement durable, le CSE joue un rôle central dans la remontée des attentes des salariés en matière sociale et environnementale. En tant qu’instance de représentation du personnel, il capte les préoccupations liées aux conditions de travail, à l’empreinte environnementale des activités de l’entreprise, et à l’impact sociétal des décisions stratégiques.
Cette fonction de relais est d’autant plus essentielle que les salariés attendent aujourd’hui de leur entreprise des engagements concrets sur la transition écologique. À travers ses missions traditionnelles, enrichies par l’élargissement de ses prérogatives en matière de durabilité, le CSE devient une courroie de transmission indispensable entre les équipes opérationnelles et les instances dirigeantes.
Le dialogue social : un levier pour intégrer les enjeux de durabilité
La transition écologique en entreprise ne peut réussir sans une évolution du dialogue social. Celui-ci ne se limite plus à la négociation salariale ou aux conditions de travail ; il s’étend désormais à l’élaboration de stratégies de durabilité.
Intégrer la RSE au cœur du dialogue social implique de structurer des échanges réguliers sur :
- Les objectifs de réduction d’empreinte carbone
- La transformation des métiers liée aux évolutions environnementales
- L’adaptation des politiques sociales aux nouveaux défis écologiques
En devenant un acteur du dialogue environnemental et social, le CSE renforce sa légitimité et contribue activement à la construction d’une gouvernance plus responsable.
Sensibiliser, impliquer et former les élus sur les sujets RSE
La montée en compétences des membres du CSE constitue un levier déterminant pour accompagner la transition écologique. Comprendre les enjeux du reporting extra-financier, appréhender les impacts du changement climatique sur les organisations, analyser les plans d’action RSE : autant de compétences nouvelles qui nécessitent un effort de formation ciblée.
Plusieurs syndicats et organismes spécialisés proposent aujourd’hui :
- Des modules de sensibilisation aux enjeux environnementaux
- Des formations sur la lecture et l’analyse des rapports de durabilité
- Des outils pratiques pour intégrer la transition écologique dans les missions du CSE
L’implication active des élus passe par leur capacité à comprendre, questionner et enrichir les démarches RSE initiées par l’entreprise. Une sensibilisation régulière permet d’aligner les actions du CSE avec les nouvelles attentes en matière de développement durable.
La concertation continue : consultation, propositions et suivi
Au-delà des consultations formelles imposées par la législation, la réussite de l’intégration des enjeux RSE repose sur une concertation continue entre le CSE et la direction. Cette dynamique passe par :
- Une implication précoce du CSE lors de l’élaboration des stratégies RSE
- La capacité des élus à formuler des propositions opérationnelles adaptées aux réalités du terrain
- Un suivi rigoureux des engagements pris, à travers l’analyse de la BDESE, des bilans carbone ou des rapports d’audit ESG
Le rôle du CSE ne se limite donc pas à réagir aux propositions de la direction. Il consiste également à anticiper, à challenger les plans d’action, et à construire, avec les autres parties prenantes, une trajectoire de durabilité cohérente et partagée.
Exemples concrets et initiatives illustrant le rôle actif des CSE dans la transition écologique
Initiatives locales : collectifs salariés et co-construction de plans bas carbone
L’engagement des CSE dans la transition écologique se traduit de plus en plus par des actions concrètes au niveau local. De nombreux collectifs de salariés, souvent impulsés ou soutenus par les élus du personnel, émergent au sein des entreprises pour promouvoir des initiatives bas carbone.
Ces collectifs participent à la co-construction de plans d’action intégrant :
- La réduction des déplacements professionnels
- La mise en place de mobilités durables (forfaits mobilités, vélos de service)
- La rationalisation de l’usage énergétique des bâtiments
En soutenant ces démarches, les CSE contribuent directement à la stratégie de durabilité de l’entreprise, tout en renforçant la sensibilisation des collaborateurs aux enjeux environnementaux.
Pratiques responsables intégrées aux actions sociales et culturelles
Le champ d’action du CSE ne se limite pas aux consultations stratégiques. Il s’étend également aux actions sociales et culturelles, qui peuvent être orientées vers des pratiques plus responsables.
Plusieurs CSE ont ainsi :
- Révisé leur politique de cadeaux salariés pour privilégier des produits locaux, éco-conçus ou issus de l’économie sociale et solidaire
- Intégré des critères environnementaux dans le choix des prestataires pour les événements collectifs
- Proposé des activités de sensibilisation, telles que des ateliers fresques du climat ou des conférences sur la transition écologique
Ces choix, en cohérence avec la responsabilité sociétale des entreprises, renforcent la légitimité du CSE comme acteur engagé dans la durabilité.
Articulation entre CSE, syndicats et directions dans les stratégies RSE
Le succès des démarches RSE passe par une articulation efficace entre les différentes parties prenantes internes. Les élus du CSE, les syndicats représentatifs et les directions doivent travailler de concert pour intégrer les enjeux de durabilité dans la gouvernance d’entreprise.
Cette collaboration peut se matérialiser par :
- L’intégration de représentants du CSE dans les comités RSE d’entreprise
- L’élaboration commune d’accords collectifs portant sur la transition écologique
- L’organisation de formations croisées sur les thématiques sociales et environnementales
La synergie entre dialogue social et dialogue environnemental est un facteur déterminant pour l’adhésion des salariés et la crédibilité des engagements pris.
Premiers retours d’expérience post-CSRD : limites et perspectives d’amélioration
Depuis l’entrée en vigueur de l’obligation de consultation du CSE sur les informations de durabilité en janvier 2025, les premiers retours d’expérience mettent en lumière plusieurs enseignements.
Parmi les limites constatées :
- Une compréhension encore partielle des enjeux RSE par certains élus, faute de formation suffisante
- Des consultations parfois réduites à des formalités, sans réelle concertation sur les plans d’action
- Une difficulté à intégrer pleinement les informations environnementales dans les bases de données économiques et sociales
Toutefois, les perspectives d’amélioration sont nombreuses. Une meilleure anticipation des consultations, un renforcement de la formation des élus et une co-construction plus systématique des projets RSE peuvent permettre de transformer ces obligations légales en véritables leviers stratégiques pour l’entreprise.
L’intégration pleine et entière du comité social et économique aux démarches de transition RSE constitue aujourd’hui un enjeu stratégique pour les entreprises. La transformation réglementaire impulsée par la directive CSRD et la montée en puissance des attentes sociétales redéfinissent profondément le rôle du CSE. De simple acteur du dialogue social, il devient un levier déterminant pour construire des stratégies de durabilité solides, cohérentes et crédibles.
Au-delà de l’obligation légale d’information et de consultation, c’est un véritable changement de culture qui s’opère. Passer d’une approche de conformité minimale à une dynamique proactive suppose d’associer étroitement les élus à l’élaboration, à la mise en œuvre et au suivi des plans d’action RSE. Le CSE ne se contente plus d’observer ou de contrôler ; il participe à l’orientation des politiques d’entreprise vers un modèle respectueux des limites environnementales et attentif aux enjeux sociaux.
Pour réussir cette transition, la coopération entre élus, directions et parties prenantes est essentielle. Renforcer les passerelles entre le dialogue social et le dialogue environnemental, favoriser la formation des représentants du personnel aux enjeux de durabilité, structurer des concertations régulières : autant de conditions pour bâtir une entreprise véritablement durable, capable de concilier performance économique, responsabilité sociétale et respect des équilibres écologiques.
La transition RSE en bref
Pourquoi la directive CSRD renforce-t-elle le rôle du CSE ?
La directive CSRD impose depuis janvier 2025 la consultation obligatoire du CSE sur les informations de durabilité. Elle renforce ainsi la participation du CSE aux décisions stratégiques, en intégrant pleinement les enjeux sociaux, environnementaux et de gouvernance au dialogue social, avec une responsabilité accrue dans le suivi de la transition RSE.
Quelles informations la BDESE doit-elle désormais contenir ?
La BDESE doit intégrer des données relatives à l’empreinte carbone, aux politiques d’égalité et d’inclusion, aux plans de sobriété énergétique et à la gouvernance durable. Cette évolution permet aux élus de mieux analyser les engagements de l’entreprise et de s’appuyer sur des indicateurs précis pour alimenter les consultations et le dialogue social.
Comment le CSE peut-il accompagner la transition écologique ?
Le CSE peut relayer les préoccupations des salariés, proposer des actions concrètes adaptées aux enjeux écologiques, et s’impliquer dans l’élaboration des stratégies RSE. En se formant aux enjeux environnementaux et en s’appuyant sur la BDESE, il contribue activement à orienter l’entreprise vers un modèle plus responsable.
Quels sont les principaux défis post-CSRD pour les CSE ?
Les CSE doivent renforcer leur expertise sur les sujets RSE pour assurer une analyse critique des stratégies présentées. Les défis incluent la compréhension des rapports extra-financiers, le suivi régulier des engagements pris et l’implication proactive dans les processus de consultation sur la durabilité de l’entreprise.